En brisant la doctrine Chevron, la Cour suprême met notre santé, notre environnement et nos vies en danger

Une fois de plus, la majorité conservatrice de la Cour a fait passer les intérêts des entreprises avant le reste d'entre nous, avec une décision de 6 contre 3 qui rend plus difficile pour les agences fédérales de protéger le public contre des menaces allant de la crise climatique aux escroqueries boursières.

Les décisions rendues dans deux affaires – Loper Bright Enterprises c. Raimondo et Relentless, Inc. c. Département du Commerce – a renversé une doctrine juridique importante connue sous le nom de « déférence Chevron ».

Ce principe de longue date est né d’une décision de la Cour suprême de 1984 dans l’affaire Chevron contre le Natural Resources Defense Council, dont je dirige désormais le fonds d’action.

Le NRDC a effectivement perdu ce procès en 1984, mais le tribunal a eu raison sur le principe, en statuant que lorsqu'une loi est vague, un tribunal fédéral doit s'en remettre à l'interprétation de la loi par une agence fédérale, tant que les conclusions de l'agence sont raisonnables.

En annulant la déférence de Chevron vendredi, le tribunal a invité les juges des tribunaux inférieurs irresponsables à substituer leurs préférences politiques personnelles à l'expertise des agences fédérales. Les juges sont désormais plus libres de réécrire efficacement nos lois et de bloquer les protections qu'elles sont censées offrir.

Les agences fédérales comme l'Agence de protection de l'environnement, le ministère de l'Intérieur, le ministère de l'Énergie et d'autres sont composées de professionnels possédant une vaste expertise technique, juridique et scientifique dans les domaines qui les concernent. Ils protègent les eaux océaniques des dangers des forages pétroliers et gaziers en mer, assurent la propreté de notre air et de notre eau et protègent le public des produits chimiques toxiques. Cette expertise est essentielle pour rédiger et mettre en œuvre des lois qui répondent aux objectifs du Congrès.

Lorsque le Congrès a adopté la Clean Water Act en 1972, par exemple, les législateurs n’ont pas prétendu comprendre chaque détail, répondre à chaque question ou anticiper chaque nouvelle menace. Il incombe à l'EPA de rédiger des règles de conduite spécifiques pour protéger efficacement nos eaux.

De même, lorsque le Congrès a adopté le Clean Air Act, ou l’Endangered Species Act, ou toute autre loi environnementale fondamentale, il l’a fait en sachant que les experts élaboreraient les règles techniques détaillées pour suivre le rythme des risques imprévus et en constante évolution.

Réduire le rôle des professionnels possédant une expertise approfondie et élargir l’influence des juges non élus dépourvus de cette expertise est exactement la mauvaise direction pour le pays.

Il s’agit d’un changement profond et terrible, le dernier d’une série de décisions judiciaires qui sapent la capacité de notre gouvernement à assurer une surveillance publique responsable des mauvais acteurs du monde des affaires.

La majorité conservatrice de la Cour s’est montrée particulièrement hostile aux mesures de protection établies en matière d’environnement et de santé publique.

Il ne se passe pratiquement pas une semaine sans que de nouvelles raisons de s’inquiéter concernant l’éthique des tribunaux et la capacité de certains membres de la Cour à rendre des décisions justes et impartiales sur des affaires cruciales pour le sort de la nation ne soient troublées.

Alito et Thomas ont tous deux accepté des cadeaux somptueux, des vacances de luxe et d'autres avantages financiers de la part de riches hommes d'affaires qui ont eu des problèmes devant le tribunal. Comme l’a dit le représentant Jamie Raskin (Démocrate du Maryland), avant d’organiser récemment une table ronde sur la question : « Le plus haut tribunal du pays a les normes éthiques les plus basses. »

Il y a trois leçons principales à tirer de cette situation. La première est que les élections sont importantes.

En novembre, lorsque nous, le peuple, déciderons qui sera notre prochain président, cela aura également son importance. Serons-nous capables d’apporter un équilibre si nécessaire à la Cour suprême, ou un second mandat de Trump renforcera-t-il ou élargira-t-il la supermajorité conservatrice de 6 contre 3 qui a placé cette Cour si loin du courant dominant de l’opinion publique et de l’intérêt national ?

La deuxième leçon est que le Congrès a un rôle essentiel à jouer dans la défense du public contre les risques évitables. Là où la Cour suprême a agi pour affaiblir d’importantes protections dont nous dépendons en tant que société, le Congrès a le devoir de réparer les dégâts en adoptant une législation forte et claire pour rétablir ces protections.

Si la Cour suprême cherche à affaiblir la capacité du gouvernement fédéral à « veiller à ce que les lois soient fidèlement exécutées », comme le prévoit la Constitution, le Congrès a le devoir d’adopter une loi affirmant le rôle des agences fédérales dans la mise en œuvre de ses intentions. Si ce Congrès n’agit pas, les électeurs ont l’obligation d’élire un Congrès qui le fera.

Enfin, les juges de la Cour suprême ont le devoir de se montrer à la hauteur des normes de conduite qui conviennent aux fonctionnaires chargés d’un mandat à vie au sein de la plus haute juridiction du pays. Le public ne devrait pas avoir à se demander si les décisions judiciaires sont motivées par des préjugés, influencées par des pots-de-vin ou influencées par des tendances partisanes.

Si l’on ne peut pas compter sur la Cour pour faire ce qu’il faut pour regagner la confiance du peuple américain, le Congrès devrait prendre des mesures pour restaurer cette confiance dans l’institution qui pèse si lourdement sur notre vie quotidienne et sur le type de nation que nous avons.